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Stanley Kubrick aurait caché dans Shining la preuvre que l'homme n'a pas marché sur la Lune. 

Mise à jour du 4 novembre 2016 : Arte diffusera Room 237 ce soir à partir de 22h30. L'occasion de republier notre interview du réalisateur du documentaire, qui présentait quelques-unes des théories les plus folles autour de l'adaptation de Shining par Stanley Kubrick.

Interview du 18 juin 2013 : Auteur de Room 237, documentaire halluciné sur les théories les plus démentes bâties autour de Shining (1980), le réalisateur Rodney Ascher revient sur les folles exégèses d'un des chefs-d'oeuvre de Stanley Kubrick.

La structure de Room 237 est surprenante : on a le sentiment au début que vous vous moquez de ces fous de Shining puis, à mesure que leurs théories s’empilent et s’additionnent, le film commence à leur accorder du crédit…
Rodney Ascher : La structure de Room 237 s’est construite de façon organique. Le film n’est pas nécessairement celui que je pensais réaliser en commençant… Je partais sur quelque chose de plus conventionnel, de plus littéral : « Voici certaines des théories échafaudées à partir de Shining, je vous les présente une à une, jusqu’à la fin ». Mais les interviews que ces fans nous donnaient se sont avérées plus longues que prévu, et ils nous révélaient à chaque fois des connexions très personnelles avec le film de Kubrick… En cours de montage, on a mis ces blocs de cinq minutes (un bloc par interviewé) côte à côte, en essayant de les croiser et de les relier thématiquement. Etrangement, on s’est retrouvé avec une structure traditionnelle en trois actes. Coup de bol !

Le spectateur, comme les exégètes de Shining dont les voix se superposent, se retrouve perdu dans l’espace du film de Kubrick. Et Room 237 devient, de façon presque subliminale, le labyrinthe à l’intérieur duquel Jack Torrance (Jack Nicholson) poursuit son fils…    
On s’est très vite aperçu que si, dans la fiction mise en place par Stephen King, l’hôtel Overlook et le labyrinthe constituent un monde à l’intérieur duquel les protagonistes restent prisonniers, c’est pareil pour Shining version cinéma : un monde en soi, un monde qui nous emprisonne. J’ai toujours trouvé cette idée fascinante.

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Peu de films dans l’histoire du cinéma conservent une part de mystère et d’insondable, longtemps après leur création. Le premier King Kong de Cooper et Schoedsack, certains Hitchcock… Pourquoi Shining, et pas 2001, l’odyssée de l’espace par exemple ? Pourquoi le Kubrick que tout le monde aime, et pas celui auquel « on ne comprend pas tout » ?
C’est intéressant. 2001, en surface, semble inviter ce type de raisonnements et de visionnages obsessionnels. C’est un film presque exclusivement métaphorique, et beaucoup de choses ont été écrites à son sujet. Tout, à vrai dire, a été écrit à son sujet. Ce qui est intéressant avec Shining, c’est qu’on ne parvient pas aussi facilement à expliquer son emprise sur nous. Comme les personnes que j’interviewe dans Room 237, je suis prisonnier de ce film. Mon esprit est prisonnier de ce film… Hier encore, je parlais de Jack Torrance à mon producteur et je lui disais : « Tiens, un autre truc à propos de Shining… »

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Encore un « autre truc » ?
Mais oui, c’est sans fin ! Shining est ambigu et étrange à l’intérieur même de sa structure de film d’horreur classique : c’est un film de maison hantée, l’histoire d’un papa qui devient fou et tue sa famille, et pourtant on peut y accrocher à peu près tout : l’Holocauste, le génocide indien, les premiers pas de l’homme sur la lune… Sans fin, je vous dis. Il y a un moment dans le film, à mi-parcours, où l’histoire se fragmente. C’est un film très long (la version américaine ajoute vingt minutes à la version européenne, elle-même conséquente), et peu de choses y sont résolues. Personne ne peut vraiment dire ce que signifie cette photo à la fin et, s’il y a bien un fantôme à l’œuvre, il ne promet rien et ne donne aucune raison particulière à Jack pour assassiner sa famille… Je connais plein de gens qui affirment avec conviction qu’il n’y a pas de fantômes dans Shining, que tout ça n’est que le fruit de l’imagination de Jack. Chaque fois qu’il aperçoit un fantôme dans le film, il se trouve devant un  miroir, face à lui-même : au bar quand il parle avec Lloyd, aux toilettes avec Grady…

L’un des plus grands théoriciens de Shining, MasterMind, n’a pas souhaité être interviewé pour Room 237. Quelle était sa théorie ?
C’est assez complexe. En gros, il explique que Shining est un essai sur la supériorité de l’Image sur l’Ecrit. Jack Torrance est un écrivain, l’écriture est un art mourant et le cinéma, c’est l’avenir… Au cours du film, Jack se dissout. D’être humain normal il devient reflet dans un miroir, puis gelé dans la glace, et enfin prisonnier d’une vieille photo en noir et blanc. Il commence le film derrière une machine à écrire et le finit à l’intérieur d’une vieille photo... Intéressant, non ?

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Bande-annonce de Room 237 :