Blue - Apichatpong Weerasethakul
3e Scène/Opéra de Paris

La plateforme numérique de l’Opéra de Paris propose un court-métrage d’une sidérante beauté réalisé par le lauréat de la Palme d’Or en 2010.

Les fans du cinéaste thaïlandais Apichatpong Weerasethakul - aka « Joe » pour les intimes ! - le savent, l’homme de 48 ans, ne limite pas son art à un seul format et aime l’envisager comme une matière vivante qui se joue des normes. On se souvient peut-être, que le générique de début de son deuxième long-métrage, Blissfully Yours (2002), arrivait après une heure de projection. Ses films, courts ou longs, siéent aussi bien aux salles obscures qu’à des accrochages dans des musées. Ce qui n’empêchent bien-sûr pas une reconnaissance internationale des plus prestigieuses, pour preuve ses trois prix cannois dont une Palme d’Or pour Oncle Boonmee en 2010.

Une sérénité souveraine

Voici Blue, un court-métrage de 12 minutes, présenté cet été aux Rencontres d’Arles avant de passer par le Festival International de Toronto. Depuis le 3 octobre, il est visible gratuitement sur la 3ème Scène, l’espace numérique de l’Opéra de Paris. Le film, d’une splendeur inouïe, porte d’emblée la marque de son auteur. Avant même que la première image n’apparaisse, le murmure nocturne d’une végétation luxuriante charge l’atmosphère d’une sérénité souveraine. Puis, c’est une femme allongée dans un lit qui accueille les yeux du spectateur prolongeant cet état de calme olympien. Des peintures sur toile colorées, représentant tantôt un temple, un paysage marin sur fond de soleil couchant ou une route gorgée de soleil, se succèdent mécaniquement tel le décor naïf d’un petit théâtre en plein air. Bientôt une flamme vient se refléter sur la couverture bleue de l’endormie avant de se propager en incendie. C’est simple, beau, inflammable… D’une admirable pureté…

Une affaire de fantômes

Par un jeu de reflets, de superpositions d’images, « Joe » poétise son cadre et rappelle qu’au cinéma tout est affaire de spectres, de fantômes et que le divin préside à toutes les destinés représentés. Weerasethakul à l’inverse du philosophe Kleist et son Théâtre de marionnettes, croit à la sensibilité et aux pouvoirs magiques de toutes les matières. Vivantes ou non.