L'Homme de la cave
Caroline Bottaro

Le réalisateur et scénariste Philippe Le Guay s’est inspiré de ce qui est arrivé à ses amis.

Dans L'Homme de la cave, le réalisateur et scénariste Philippe Le Guay raconte comment un couple (Jérémie Renier et Bérénice Bejo) décide de vendre une cave dans l’immeuble où ils habitent. Un homme au passé trouble (François Cluzet) l’achète et s’y installe sans prévenir. Peu à peu, sa présence va bouleverser la vie du couple… Un étonnant film sur le négationnisme, sorte de thriller mental aux accents polanskiens. Mais le plus fou est que L’Homme de la cave est inspiré d’une histoire vraie, qui est arrivée à des amis proches du cinéaste. « Ce couple a décidé de vendre sa cave à un homme qui souhaitait entreposer des archives. Ils ne se sont méfiés de rien et ont donné la clé de la cave en même temps qu’ils ont encaissé le chèque. Ce qu’ils n’avaient pas prévu, c’est que l’homme s’installerait physiquement dans la cave… Cette vente banale s’est transformée en un véritable cauchemar. L’acquéreur s’est révélé être un néo-nazi pur et dur, un des piliers du négationnisme en France. Quand le couple a voulu annuler la vente, c’était trop tard. Sans le savoir, ils avaient scellé la vente puisque dans le droit français ‘’tant qu’il y a accord sur la chose et sur le prix, la vente est conclue’’. Ils ont subi un tel traumatisme que leur couple a explosé, alors qu’ils s’adoraient. Ils m’ont autorisé à raconter leur histoire, à condition de ne pas les exposer. A priori, je n’avais aucune vocation à traiter du thème du négationnisme, mais la situation était tellement folle que je n’arrivais pas à m’en détacher. », raconte Philippe Le Guay. Le scénario se permet évidemment de romancer l’affaire, mais l’essentiel est bien là.

« Dans la vraie vie, l'histoire a fait l'objet de deux procès. Le couple a perdu le premier et au bout de deux ans a fini par gagner le deuxième. Ils ont enfin pu se débarrasser de l'homme de la cave. Je ne crois pas que j'aurais été capable d'imaginer une histoire pareille, la situation paraît impossible… Mais le fait que ça ait eu lieu m'autorisait à m'en emparer et à aller jusqu'au bout », assure le cinéaste à Première.

Le projet a pourtant longtemps été rangé au placard : « J’ai mis douze ans à faire ce film. Je me suis plongé dans l'histoire en 2009, j'ai commencé à rassembler de la documentation, à lire des livres sur le négationnisme… Et j'étais un peu écrasé par la responsabilité que j'avais à traiter pareil sujet, et par la difficulté de rendre compte et d’expliquer en deux heures les mécanismes employés par ce personnage... Quelque chose m'a intimidé et puis je l'ai laissé reposer. Et il se trouve qu'il y a deux ans, j'ai eu envie de le reprendre, parce que j'ai ressenti autour de nous tous ce discours complotiste. Cette petite musique qui dit : ‘’Je pose juste des questions’’, mais qui est une remise en cause la vérité officielle... C'était exactement cette rhétorique là que tient le personnage de L'Homme de la cave. Je trouvais que c'était bien de donner les moyens aux spectateurs de décrypter ce langage. »

L’Homme de la cave, avec Jérémie Renier, Bérénice Bejo et François Cluzet. Actuellement au cinéma. Bande-annonce :