Borgo

Cinq ans après son remarquable film de procès La Fille au bracelet hélas passé trop inaperçu (malgré sa nomination au César de la meilleure adaptation), Stéphane Demoustier a décidé de passer par la case prison. Et pour cela, il met le cap sur la Corse avec comme héroïne une surveillante pénitentiaire (Hafsia Herzi, une fois encore impressionnante dans la foulée de sa nomination aux César 2024 pour Le Ravissement) tout juste nommée dans un établissement à régime ouvert sur l’île de Beauté et qui va, au fil des rencontres qu’elle y fait avec divers détenus à l’intérieur et hors des murs, flirter de plus en plus dangereusement avec le milieu du banditisme local. On retrouve ici tout ce qui a fait la réussite de La Fille au bracelet : un récit (inspiré par des faits réels) documenté avec soin mais qui fait la part belle au romanesque. Faisant un sort aux clichés habituels sur la Corse, Stéphane Demoustier signe un film à la tension sourde où il rend sans cesse crédible et prenante la lente descente aux enfers de cette matonne, peu à peu dépassée par les services de plus en plus importants qu’on lui demande. Et ce grâce à une gestion parfaite de la durée où les deux heures dans lesquelles se déploie son intrigue ne souffrent d’aucun temps mort sans pour autant jamais céder à la moindre précipitation. Mais aussi et surtout à un scénario audacieux, jouant à la fois avec les points de vue sur la situation et la temporalité des actions, dans un geste d’une fluidité impressionnante. Le meilleur film de son auteur.